Un collègue m'a gentiment donné son invitation pour la projection en avant-première du nouveau film de Tsai Ming Liang. Je lui ai dit que j'étais partante pour prendre la place mais que je ne connaissais pas le réalisateur... et là ... il m'a dit que c'était le réalisateur de
la saveur de la pastèque. Je ne l'ai pas vu non plus celui-ci mais je me souviens très bien des critiques, la plupart accusant ce film de "porno faussement poétique", bref la soirée risquait d'être un peu déstabilisante... Arrivée sur la place soi-disant de la liberté, devant le mausolée de Chank Kai Chek où stationnaient beaucoup de touristes souhaitant sans doute souhaiter bonne nuit au dictateur, j'ai été surprise de me retrouver au milieu de la jet set taiwanaise.
Voitures noires, vitres fumées, robes de soirée, journalistes, le directeur du Louvre en personne Mr Loyrette, le réalisateur du film, les acteurs taiwanais, bref tout le gratin. "Mais qu'est-ce que je fous là?" me suis-je demandée...
Le film se nomme Face et je suis restée parce que Fanny Ardant, Mathieu Amalric, Nathalie Baye, Jeanne Moreau, Jean-Pierre Leaud et Laetitia Casta jouent dans le film.
ça commence dur, par l'impuissance, l'impuissance d'un homme face a un robinet qui explose, impuissant à arrêter l'inondation dans l'appartement et quelques temps après; la mort de sa mère, et puis ça finit sur une Salomé-Casta à moitié nue, rejouant la scène de la décapitation de Iokanaan, prenant au piège ce même homme, impuissant sexuel face à la danse lascive de la jeune femme fatale.
Pour moi c'est très clair, surtout lorsque j'ai vu le réalisateur sur scène après le générique de fin qui comporte la dédicace "à ma mère", en pleurs... un film un peu autobio, ou bien une manière de mettre ses tripes en images.
Alors certains diront c'est chiant, y a pas de scénario, une Fanny Ardant à Taiwan complètement décalée qui mange les fruits de l'autel de la mère fraîchement morte, quel choc! ou bien Nathalie Baye et Jeanne Moreau invitées à un repas auquel personne ne vient, ou encore Jean-Pierre Leaud qui se cache dans le Louvre habillé en Hérode Le Grand et refusant de jouer son rôle car il n'est pas amoureux de Fanny Ardant. Oui, ça n'a pas de sens, vu comme ça.
Je me suis approchée du réalisateur taiwanais, un jeune chauve plein d'énergie préoccupé à remercier le directeur du Louvre...
En sortant de la salle, couloir tapissé de rouge impérial, Chang Kai Chek n'est pas loin et tout porte son nom dans le coin, l'acteur est là, et se fait prendre en photo par deux jeunes en t-shirt rouge comme le sol et comme la sauce tomate que met la Salomé-Casta sur lui pour imiter la mort de Iokanaan.
Un film qui ne plaira pas, mais qui pourtant dit beaucoup sur la mort, la culture française, et Taiwan...