samedi 2 mai 2009

Le lycée 雄中 de garçons de Kaohsiung: toute une histoire!!

J'ai connu le lycée de 雄中 (prononcer siong djhong) en septembre car ils cherchaient des professeurs de français pour enseigner deux heures par semaine. J'ai donc accepté de travailler là-bas depuis. Mais rapidement je me suis rendue compte que ce lycée n'était pas vraiment comme les autres. Au-delà des remarques admiratives des taiwanais dès qu'il s'agit d'évoquer cet établissement, j'ai bien compris qu'il avait une histoire particulière!!
Ainsi j'ai décidé de chercher petit-à-petit des informations, je n'ai rien trouvé sur Wikipédia, même en chinois! Mais en parlant avec Jeff, le fameux historien qui est le spécialiste de l'Histoire de Taiwan, j'ai pu avoir accès à d'autres informations, et même avoir un rendez-vous avec l'historien spécialiste de l'Histoire de ce lycée !!
Voici mon reportage!
En fait, ce qui m'a le plus étonnée c'est l'architecture qui ressemble vraiment à celle des bâtiments japonais de la ville (l'Ambassade britannique et l'école de Kung Fu à Siziwan par exemple). Les fameuses briques rouges sont bien souvent la marque de l'occupation japonaise. Et pour ce lycée c'est le cas car il a été construit en 1922 sous l'occupation japonaise. Un premier lycée japonais avait été construit au nord, à Taipei et le second fut construit à Kaohsiung car le quartier de la gare fut jugé moins touché par les risques de malaria que Pingtong 屏東. Les japonais enseignaient l'anglais, le japonais et également 2 heures de taiwanais pour aider les sinophones à communiquer avec la population locale. A l'époque il y avait une centaine d'étudiants, maintenant il y en a 2 785.
Ce lycée avait pour vocation d'attirer les japonais à faire leurs études sur l'île et à préparer les futures élites japonaises. Mais le lycée était également ouvert à 25% de taiwanais qui pouvaient venir faire leurs études ici. Les étudiants devaient se prosterner chaque matin lors de leur arrivée au lycée devant le temple dédié à un culte japonais placé au bout du couloir de l'entrée principale:Désormais c'est Sun Yat Sen qui a pris la place de ce temple. Un second temple dédié à l'empereur japonais se trouvait sur la montagne Wan Shou Shan et lors de son anniversaire les étudiants devaient aller sur la montagne et rendre un culte à l'empereur. Les traces de ce temple sont encore visible mais le lieu a très vite été transformé au profit des symboles chinois.
A l'arrivée de Tchang Kaï-chek 蔣介石, en 1949 l'enseignement du japonais fut arrêté, ce n'est qu'en 1988, après la fin de la loi martiale et de la mort du dictateur que la langue japonaise put être de nouveau enseignée.
Le lycée fut aussi le théâtre des fameux événements du 28 février 1947. L'armée a réprimé violemment les manifestations anti-chinoises (la Chine venait de récupérer Taiwan après la défaite du Japon). L'armée est arrivée dans le lycée et a abattu des étudiants qui, avec leur arme d'entraînement militaire ont tiré sur l'armée. Le nombre de morts est inconnu mais on peut voir sur les murs du lycée des trous causés par ces combats.
Et puis comme dans tous les établissements publics de Taiwan, il y a la fameuse place pour le lever de drapeau. Selon Jeff ça n'a plus aucun caractère militaire mais chaque mercredi et vendredi, une petite cérémonie est organisée et tous les 28 février il faut mettre le drapeau en berne, signe du deuil national (comme dans l'école de Xiao Chuan à Taipei cf. blog le 28 février 2009). Au milieu du lycée on peut voir un monument en pierre, un peu à l'abandon et qui comporte une date. Selon Jeff, c'est lors de la fin de la guerre de Corée en 1954, les soldats taiwanais ont demandé de retourner à Taiwan.Mais c'est un monument de l'époque du Guomingtang donc le lycée ne s'en préoccupe pas trop, politiquement parlant tout ce qui a trait au Guomingtang de l'époque de Tchang Kai Chek n'est pas trop mis en avant... l'époque dictatoriale n'est pas une grande fierté pour Taiwan.
D'ailleurs, juste à côté de ce monument, hasard ou coincidence, se trouvent des bâtiments qui vont être bientôt rasés, regardez leur état vous allez comprendre pourquoi:Ces bâtiments datent des années 50, l'époque de Tchang Kai Chek et selon Jeff, ils ont été mal fabriqués et donc ne résistent pas à l'effet du temps, ils s'usent beaucoup plus vite que les bâtiments plus anciens, des japonais.
J'ai bien aimé cette explication car finalement elle concentre un peu l'opinion des taiwanais sur leur passé, en tous cas pour les personnes d'un certain âge comme Jeff. C'est comme une métaphore de l'Histoire de Taiwan, la soit-disant finesse de la culture japonaise opposée à la dureté grossière du Guomindang!! Ce sont les bâtiments blancs à droite ci-dessus.D'ailleurs le passé japonais en plus d'être visible à travers la simple présence de ces immenses arbres plantés à cette époque (les japonais n'étant pas habitués à un climat si chaud, ils ont planté des arbres partout), ce passé se voit dans certains détails encore visibles comme ces marches décorées en bronze: Mais le passé japonais s'actualise chaque année sur le lieu même du lycée lorsque les groupes de japonais ayant vécu et fait leurs études dans ce lycée viennent reprendre contact avec le passé. A chaque cérémonie de fin d'étude des étudiants il y a toujours des japonais, anciens élèves qui assistent à la cérémonie. Par an, environ 6 groupes reviennent au lycée, ces personnes ont entre 70 et 80 ans aujourd'hui. Le journal japonais Asahi Newspaper a d'ailleurs fait un reportage sur ce phénomène nostalgique en octobre 2008. J'ai rencontré la proviseur de ce lycée de garçons qui est très appréciée à Kaohsiung. C'est elle qui est à l'origine des cours de français en tant que LV2 et dans le cadre du club de langues étrangères dans l'établissement et elle travaille en partenariat avec Wenzao pour ce projet. Les filles aussi ont accès à l'enseignement de ce lycée depuis 1985 dans la filière musique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire